TRIBUNE

Elus locaux et acteurs de la restauration appellent le gouvernement à rendre obligatoire l’option végétarienne dans les cantines et les restaurants des hôpitaux, des universités, des armées, des prisons…

Dans une école à Villeneuve-le-Comte (Seine-et-Marne), en mars 2018. (Denis Allard/Libération)

par Un collectif – Publié le 2 mars

Nous, élu·e·s locaux, acteurs et actrices de la restauration collective, demandons au gouvernement de s’engager à reprendre sans filtre la proposition de la Convention citoyenne pour le climat pour une option végétarienne quotidienne qui soit obligatoire et s’applique dans toute la restauration collective. Nous sommes de toutes couleurs politiques et représentons des structures de toutes tailles, de tout type, réparties sur tout le territoire français. Nous avons déjà mis en place l’option végétarienne quotidienne (et donc l’expérimentation que propose le gouvernement) ou nous souhaiterions le faire.

Tout comme 80 % des Français, nous sommes favorables à l’obligation pour la restauration collective de proposer des menus végétariens. Ainsi, nous demandons que l’option végétarienne soit obligatoire dans la restauration scolaire en allongeant le délai d’application de cette mesure pour laisser le temps à toutes les communes de la mettre en place de manière efficace et satisfaisante. Nous demandons que l’option végétarienne soit étendue à l’ensemble de la restauration collective (restauration universitaire, administrative, sanitaire et sociale…). Nous appelons enfin l’État à investir davantage dans la restauration collective, en accompagnant techniquement et financièrement les structures pour augmenter leur offre végétarienne.

La végétalisation des assiettes, pilier de la transition écologique

La justice vient de condamner l’inaction climatique de l’Etat suite à l’Affaire du siècle, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat alerte régulièrement sur les dangers de cette inaction, et la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a déjà montré le rôle malheureux de l’agriculture et de l’élevage dans la destruction de la biodiversité. Alors que débutent les débats parlementaires autour de la loi Climat, la France ne peut plus se permettre de retarder encore le virage écologique qu’elle doit prendre. Ce virage passe notamment par la mise en place d’alternatives végétariennes dans la restauration collective publique, dans laquelle pas moins de 4 milliards de repas sont servis chaque année, et dont l’empreinte environnementale serait réduite de 19 % avec une alternative végétale prise quotidiennement par 25 % des convives. La végétalisation de la restauration collective est ainsi un des leviers les plus puissants dont nous disposons pour faire de nos territoires des fers de lance de la transition agroécologique !

La diversification des protéines répond à des enjeux de santé publique. L’Agence nationale sécurité sanitaire alimentaire nationale (Anses) et le Haut Conseil de la santé publique ont actualisé leurs recommandations nutritionnelles et préconisent de renforcer la consommation de légumineuses, fruits et légumes, tout en réduisant la part de produits animaux. Afin d’assurer à tous les enfants, partout en France, un égal accès à une alimentation saine, l’Etat doit encourager le développement d’une offre végétarienne dans la restauration scolaire. N’oublions d’ailleurs pas que l’option végétarienne est l’alternative la plus inclusive et laïque qui soit, permettant à chacun·e, quelles que soient ses convictions philosophiques ou religieuses, d’avoir accès à un repas équilibré.

Cela implique non seulement de rendre l’option quotidienne obligatoire par la loi, mais aussi de donner aux collectivités les moyens financiers et techniques nécessaires pour accélérer la transition alimentaire. Si l’option quotidienne devenait uniquement facultative, cela induirait mécaniquement une inégalité territoriale forte entre les communes décidant de la mettre en place et celles ne participant pas à cette expérimentation. Par ailleurs, la mise en place du menu végétarien hebdomadaire nous a montré que servir des plats végétariens fait maison favorise la structuration de filières agricoles locales et bio, ce qui profite à l’activité économique des territoires.

Démocratie alimentaire, éducation du goût

En outre, l’introduction d’alternatives végétariennes est un outil intéressant pour la démocratie alimentaire : bien pensée, la découverte de saveurs peu explorées à la maison est l’occasion de développer l’éducation au goût et l’ouverture d’esprit des plus jeunes. Elle constitue également une base intéressante pour construire chez les enfants un rapport plus éthique au vivant et aux animaux, et pour améliorer les conditions d’élevage. Enfin, contrairement à certaines idées reçues, végétaliser les assiettes est un moyen concret pour réduire les coûts des denrées et ainsi en améliorer la qualité, tout en réduisant le gaspillage alimentaire en restauration collective.

Les technicien·ne·s et agent·e·s de la restauration collective de plus de 200 villes françaises et de dizaines de structures qui servent déjà une alternative végétarienne quotidienne le disent : lorsque cette mesure est accompagnée de formations professionnelles de qualité, sa mise en place ne crée pas de difficultés insurmontables, d’autant que de très nombreuses cantines proposent déjà quotidiennement des menus alternatifs sans viande. Cette démarche est au contraire facteur de cohésion d’équipe, au service d’une alimentation de qualité. Par ailleurs, cette transition alimentaire peut être l’occasion de mieux valoriser les métiers de la restauration collective, qui pâtissent d’un manque de reconnaissance de la part des usager·e·s comme des pouvoirs publics, alors même qu’ils sont si essentiels pour notre santé et notre bien-être.

Pour la transition écologique, pour l’égalité territoriale et pour des repas sains et inclusifs, nous appelons le gouvernement à prendre ses responsabilités au plus vite, en rendant cette option végétarienne obligatoire, dans les restaurants dont les collectivités ont la charge, mais aussi dans ceux qui dépendent de l’Etat (hôpitaux, restaurants universitaires, armées, prisons, etc.). L’Etat ne peut se défausser de ses responsabilités sur les collectivités volontaires ; les efforts et leurs impacts positifs doivent être répartis entre tous les acteurs et entre tous les territoires.

Premiers signataires : Marie Massart et Luc Lignon, déléguée à la politique alimentaire et directeur de la politique alimentaire, Montpellier ; Yves Jégo, ancien ministre et ancien maire, Montereau Fault Yonne ; France Gerboin, Commis de cuisine, Restaurant universitaire d’Angers ; Laurent Garcia, maire, Laxou ; Eric Piolle, maire, Grenoble ; Christophe Najdovski, adjoint à la Maire de Paris en charge de la biodiversité et de la condition animale ; Jacques Boutault, Adjoint à la maire, Paris ; Théo Challande Névoret, adjoint au maire, Marseille ; Michel Procureur, adjoint aux finances et à l’environnement, Bressey-sur-tille ; Jean-Pierre Gorges, maire, Chartres ; Abdelkrim Karmaoui, vice-président d’Est Ensemble, adjoint au maire, Bagnolet ; Gaëlle Rougier, adjointe déléguée à l’Éducation, Rennes ; Mourad Laoues, élu municipal, Chalon-sur-Saône ; Cécile Paulet, adjointe au maire en charge de l’éducation et de la jeunesse, valence ; Ghislaine Rodriguez, adjointe en charge de l’Education et de la Restauration scolaire, Nantes.

Retrouvez tous les signataires à cette adresse.

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