Par Gil MartinPublié le 2 mai 2024 à 19h22

La chambre régionale des comptes -CRC- d’Occitanie s’est penchée sur les actions de la Métropole de Montpellier dans le cadre de l’adaptation des villes au changement climatique. Dans sont rapport de 47 pages, elle soulève plusieurs points négatifs, dont « la mise en place tardive de son plan climat air énergie territorial et solidaire », qui selon elle demeure « imparfait ». Le rapport pointe aussi les politiques développées autour de l’arbre.

Montpellier soigne ses arbres

Selon la CRC, « La stratégie de végétalisation de la ville-centre ne repose pas sur une connaissance précise des îlots de chaleur urbains », alors que la végétalisation de l’espace public est un axe d’intervention fort pour la commune, qui a notamment lancé l’opération 50 000 arbres plantés d’ici 2026…

Les observations de la chambre régionale des comptes égratignent au passage le Comité Arbre mis en place en février 2021 par la Ville, et qui doit donner un avis sur tous les projets d’aménagement impactant le patrimoine arboré existant, en particulier sur le domaine public, et conçu « comme une véritable instance de co-construction ».

« Les 50 000 arbres devaient être plantés jusqu’en 2030. J’ai tenu à accélérer : nous terminerons le programme en 2026 avec 4 ans d’avance. »

Stéphane Jouault, Adjoint au Maire de Montpellier, délégué à la nature en ville et biodiversité, président duComité Arbre

Dans son rapport qui est public, la CRC d’Occitanie remet en cause le rôle de ce Comité, une remarque qui contrarie la collectivité. Et notamment Stéphane Jouault, Adjoint au Maire de Montpellier, délégué à la nature en ville et biodiversité et président du fameux Comité Arbre qui défend son bilan. La CRC reconnait d’ailleurs que le comité est actif : en deux ans, celui-ci aurait étudié plus de 140 projets concernant un total de 900 arbres. L’élu réagit en espérant que la CRC entende ses arguments et ne reste pas trop… dure de la feuille.

Métropolitain a recueilli l’interview de Stéphane Jouault sur ce rapport.

Dans ses observations, la Chambre régionale des comptes explique que le Comité Arbre ne comptabilise pas correctement les arbres coupés. Est-ce le cas ?
Stéphane Jouault : Oui, c’est exact, nous n’avons pas encore le décompte précis de arbres coupés… Mais il faut préciser que la très grande majorité des arbres qui sont coupés posent en fait de gros problèmes de sécurité : ils sont soit dépérissants, soit morts, et peuvent tomber. En dehors de ces cas, le Comité Arbre reste fidèle à sa ligne : des projets d’aménagements qui incluent des coupes d’arbres en bonne santé ne sont pas acceptés. Nous y veillons fermement. En quelques années, nous avons justement préservés beaucoup d’arbres qui auraient pu être coupés. Les arbres coupés sont souvent malades

Pourtant, sur le chantier du tram de la rue Lepic, des arbres (des platanes) ont été coupés et les riverains s’étonnent de leur disparition alors qu’ils devaient initialement être préservés… Quel est votre explication ?
Au départ, nous avons imposé que la totalité de l’alignement de cette rue, soit 70 arbres environ, soit préservée et cette décision a été actée. Il s’avère que lorsque les travaux ont avancé, on a découvert que les systèmes racinaires de certains arbres s’étaient trop étendus et empiétaient sur le chantier. Il a fallu les couper car il était impossible de préserver les racines : les 8 arbres concernés (sur la totalité de l’alignement) auraient été trop fragilisés. Ils ont donc été coupé. Je le regrette bien sûr, mais il est impossible de prévoir à l’avance dans ce type de travaux si des racines seront impactées ou pas… Mais l’alignement, dans sa très grande majorité, est bien préservé et ces 8 arbres seront bien évidemment remplacés.  

La ville, justement, avait promis de planter 50 000 arbres… Où en est cette promesse ?
Nous sommes dans les temps, et même mieux ! Initialement, ces 50 000 arbres devaient être plantés jusqu’en 2030. Or, j’ai tenu à accélérer : nous avons déjà planté 25 000 arbres et nous terminerons le programme en 2026 avec 4 ans d’avance. Je précise que, dans ce type de projets, nous sommes soumis à de forts questionnements, et notamment sur la nature des essences qu’il faut planter et qui doivent résister au changement climatique. De plus, les usages de l’époque, comme le fait de planter des alignements d’une seule essence, comme des platanes ou des peupliers, sont révolus. Le platane par exemple est victime d’un véritable fléau, le chantre coloré : lorsqu’un arbre est malade, vous êtes obligé d’abattre les autres platanes dans un rayon de 50 mètres. Cela s’est produit sur le boulevard Henri IV, à la hauteur du Jardin des Plantes… Aujourd’hui, on plante 4 ou 5 essences sur les alignements en voirie, ce qui permet de limiter les dégâts en cas de maladie. La palette est limitée sur la voirie, car il faut des arbres très haut, mais elle est beaucoup plus large dans les parcs où nous plantons une plus grande variété d’essences.

Pour vous, l’opération des arbres plantés sur la Comédie est-elle juste symbolique ou écologiquement justifiée ?
C’est à la fois un acte symbolique qui marque le retour de l’arbre en ville et une opération nécessaire pour mieux climatiser la ville. Les ormes de la Comédie, à terme, permettront de rafraîchir naturellement la ville. Nous avons déjà arboré des sites très minéraux afin de lutter contre les ilots de chaleur : je pense à la place Pierre Flotte, devant le tribunal, ou la place Eugène Bataillon, du côté de la fac de sciences. L’enjeu est vital : il faut rafraichir la ville avec les climatiseurs naturels que sont les arbres.

La CRC estime que le Comité de l’arbre est surtout « un comité de pilotage au service des collectivités », et souligne le fait que celui-ci n’est pas un « comité citoyen ». Etes-vous d’accord avec cette interprétation ?
Non, bien sûr. Le Comité de l’Arbre n’est pas une chambre d’enregistrement : ceux et celles qui le composent s’opposent clairement à des projets de coupes d’arbres, et nous en avons sauvegardés beaucoup… En fait, ce comité est composé d’élus mais aussi d’un chercheur du Cirad spécialiste de l’arbre, de la LPO et des Ecologistes de l’Euzières. Si le Comité de l’arbre ne fonctionnait pas, croyait-vous qu’ils y resteraient ? Je ne pense pas que la LPO par exemple garde sa langue dans sa poche… Non, je pense vraiment que ce Comité se rapproche d’un comité citoyen avec des intervenants extérieurs à la politique. En tout cas, il joue pleinement son rôle et il a déjà protégé des centaines d’arbres.

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