[Hérault Juridique] Urbanisme, métropole de Montpellier, l’interview exclusive de Coralie Mantion: « Je dis oui aux maires recycleurs »

[Hérault Juridique] Urbanisme, métropole de Montpellier, l’interview exclusive de Coralie Mantion: « Je dis oui aux maires recycleurs »

Par Virginie Moreau | Le 24 septembre 2020 à 16h00

Coralie Mantion, vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole, déléguée à l’aménagement durable du territoire, à l’urbanisme et à la maîtrise foncière, livre à l’HJE sa vision des enjeux actuels concernant ses domaines d’intervention. Une vision écologique de la ville et de la métropole.

HJE : De sensibilité écologiste, en tant que décideuse, comment concilier environnement et construction dans la ville et la métropole ?

Coralie Mantion : «En matière de planification territoriale, nous avons un objectif de zéro artificialisation nette des sols. A l’heure de l’urgence climatique et à l’aune du Covid-19, on a vu l’importance de préserver nos terres agricoles pour avoir une alimentation locale. Dans ces conditions, comment continuer à accueillir ces nouveaux arrivants sur la métropole de Montpellier ? En reconstruisant la ville sur la ville, en « recyclant » le territoire, en quelque sorte. »

« Cela a déjà été un peu fait à Montpellier, notamment sur le site de l’EAI. Cela va devoir être poursuivi pour préserver toutes ces terres agricoles que nous avons à Montpellier et sur toute la métropole. Nous arriverons à zéro artificialisation des sols si on travaille au niveau de la métropole et même au-delà, au niveau du département. Il serait compliqué de le faire uniquement au niveau du territoire de la métropole. C’est de cette façon que nous allons concilier écologie et construction.»

HJE : Quelles sont vos ambitions concernant la révision des documents d’urbanisme SCOT et PLUI ?

Coralie Mantion : «Dans le PLUI, afin d’éviter les îlots de chaleur en ville et pour aider les habitants à respirer, nous allons mettre en place une règle de 50 % d’espaces de pleine terre minimum sur chaque parcelle, en dehors évidemment du centre-ville et des faubourgs. Nous nous sommes retrouvés avec des territoires trop densifiés et invivables pour les habitants. Il est important pour nous de refaire entrer la nature en ville : il faut ces espaces de respiration en ville. Cela ne nous gêne pas de monter un peu plus en hauteur, en fonction des quartiers. Nous ciblerons, avec les services, les territoires où l’on accepte de densifier. »

« Ce sera un travail de fourmi. Il y a des zones pavillonnaires qui resteront des zones pavillonnaires. Il faut bien garder les pieds sur terre, être cohérents. Selon nous, ce n’est pas gênant que les résidences prennent un peu plus de hauteur. Nous verrons au cas par cas quelle hauteur on accepte. Nous préférons cela au fait que les résidences empiètent sur l’espace, car nous voulons conserver au maximum des terres perméables. L’imperméabilisation des sols entraîne le ruissellement et les inondations. Il faut que le sol puisse absorber les eaux de pluie. »

Nous allons également demander un retrait de 5 mètres des bâtiments par rapport à la voirie, pour que des plantations puissent y être effectuées.

« Arborer les rues permet de faire baisser la température dans les villes. Actuellement, à Montpellier et dans la métropole, bien souvent, des problèmes de réseaux empêchent de végétaliser les rues. »

« Le PLUI sera effectif en 2023, car auparavant, nous allons consulter les habitants, il y aura l’enquête publique. Entre-temps, il y aura évidemment des modifications de PLU, commune par commune, car certaines modifications ne peuvent pas attendre. Le SCOT ne viendra qu’après. Il ne sera pas fait à l’échelle de la métropole de Montpellier comme actuellement, car cela n’a pas de sens d’avoir un SCOT sur le même périmètre que le PLUI. Le futur SCOT sera un SCOT inter-EPCI, avec notamment le Pays de l’Or, le Pic Saint-Loup, etc. Il recouvrira tout le bassin de vie de Montpellier. »

« C’est important. Prenons l’exemple du centre commercial Oxylane, aux portes de Montpellier. Il ne se trouve pas sur notre métropole, et pourtant, il attirera des habitants de Montpellier, aura une influence sur la consommation à Montpellier, et risque de nuire au commerce de centre-ville. Nous n’avons malheureusement pas de pouvoir de décision. Si nous nous dotons d’un SCOT plus large qui prend en compte tout le bassin de vie de Montpellier, nous pourrons vraiment planifier, structurer et donner une cohérence au territoire. Cela signifie créer un dialogue avec les autres intercommunalités et travailler vraiment ensemble pour aller tous dans le même sens.»

HJE : Toutes les communes sont-elles prêtes à modifier leurs conditions d’urbanisme ?

Coralie Mantion : «Je fais actuellement le tour des maires. Ils se sont tous rendu compte de l’urgence climatique et que l’on ne peut plus faire de l’étalement urbain. Un chiffre frappant : en quarante ans, il y a eu une augmentation de 70 % d’imperméabilisation des sols en France, alors que la population n’a augmenté que de 19 %. C’est bien le signe que pendant quarante ans, on a construit différemment d’avant. Nous devons donc revenir à la manière d’habiter et de construire et recycler nos territoires. Il faut faire muter les zones commerciales aux entrées de villes ; créer de la mixité fonctionnelle dans nos villes. C’est ainsi que nous pourrons préserver nos terres agricoles et nos espaces naturels.»

« Je dis non aux maires bâtisseurs, oui aux maires recycleurs »

Coralie Mantion

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